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Tremblements de terre: un risque assurable

par admin
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La question sur la pertinence d’assurer le bâtiment en PPE ou en copropriété contre les dommages consécutifs aux tremblements de terre, notamment dans les cantons à risque, est régulièrement évoquée en assemblée générale des copropriétaires. Nous avons jugé utile de rédiger un condensé sur la question. Pour une analyse plus approfondie, nous laissons le soin aux propriétaires de consulter les nombreux sites traitant de la question.

 

DANGER + PROTECTION

INTENSITE D’UN SEISME

L’intensité d’un séisme ne doit pas être confondue avec la « magnitude ». Elle est définie en un lieu par rapport aux effets produits par ce séisme, qu’ils soient seulement observés ou ressentis par l’homme (réveil, chute d’objets, fissures) ou qu’ils aient causé des dégâts plus ou moins importants aux constructions.

L’intensité dépend du lieu d’observation des effets causés par le séisme. Elle décroît généralement lorsqu’on s’éloigne de l’épicentre, mais varie aussi selon la structure géologique. A l’inverse de la magnitude qui se calcule, l’intensité d’un séisme ne peut donner lieu qu’à une estimation.

En résumé on peut dire que l’intensité d’un séisme est une mesure des dommages causés par un tremblement de terre ou une évaluation des dégâts.

La mesure appliquée en Europe depuis l’an 2000 est l’échelle EMS 98 (Echelle macrosismique européenne). La méthode utilisée pour estimer l’intensité varie d’un pays à l’autre. Après les séismes on établit généralement une carte d’intensité, dont l’échelle va de I à XII.

MAGNITUDE

La magnitude d’un tremblement de terre mesure l’énergie libérée lors d’un séisme. Plus la magnitude est élevée, plus le séisme a libéré d’énergie. La magnitude s’exprime à l’aide d’une échelle logarithmique appelée « Echelle de Richter » ou pour les gros séismes, l’« Echelle de magnitude du moment » (Kanamori). Un accroissement de magnitude de 1 correspond à une multiplication par 30 de l’énergie.1

La magnitude est une valeur associée uniquement au séisme, l’intensité au lieu d’observation. Il n’existe pas de véritable relation entre magnitude et intensité. Ainsi, deux séismes de même magnitude peuvent donner en surface des intensités différentes.2

LES SEISMES EN VALAIS ET EN SUISSE

Les séismes recensés jusqu’à présent en Suisse sont inférieurs à la magnitude 7. Un séisme supérieur à cette magnitude ne peut cependant pas être exclu, mais ne s’est jamais produit à notre connaissance. Les spécialistes supputent que le tremblement de terre de Bâle (1356), le plus destructeur recensé dans les annales, avait une magnitude de 6.5 et 7, et une intensité de IX sur l’échelle actuelle. Difficile de se faire une idée précise, la première réelle échelle d’intensité datant de 1883 (Rossi-Forel). Les données sur les tremblements de terre datant d’avant le 20ème siècle, concernant aussi bien la magnitude que l’intensité, sont donc à prendre avec circonspection.

Le séisme dont on parle le plus fréquemment en Valais s’est produit le 25 janvier 1946. Il est communément appelé tremblement de terre de Sierre, de Sion, du Sanetsch ou du Rawyl. Sa magnitude était de 5.8 à 6.1 (selon les différentes sources) et son intensité de VIII selon les mesures et estimations actuelles. Il aurait fait quatre victimes, dont trois auraient succombé au choc, deux dans la région de Sierre, sans doute d’un arrêt cardiaque, et un enfant malade dans la région de Naters. Un apprenti mécanicien aurait été écrasé à Aix-les-Bains par un camion qu’il était en train de réparer.  D’importants dégâts matériels furent à déplorer, notamment dans la région sierroise, ce qui donna lieu à un grand élan de solidarité dans toute la Confédération. Les statistiques officielles de l’époque parlent de 6.8 millions de francs de dommages cumulés, ce qui correspondrait à environ 26 millions actuels. Il convient de se rappeler qu’à cette époque, la plaine du Rhône était peu peuplée.3 Selon l’Etude sur les répliques du tremblement de terre du Valais, de 1946 à 1950 établi par MM E. Wanner et M. Grütter, les dégâts ont eu lieu avant tout sur les bâtiments construits au début du siècle. Les bâtiments en béton armé ont supporté le choc sans dommage important. L’église de Notre Dame des Marais a également été fortement endommagée, étant construite sur un terrain marécageux à l’origine.

Par contre, le tremblement de terre de Brigue du 23.3.1960, dont quasiment plus personne ne parle et dont l’intensité aurait été de VII, n’aurait fait que des dégâts minimes.

Les spécialistes estiment que, entre l’an 1000 et l’an 2000, il y a eu en Suisse 40 tremblements de terre dont l’intensité était de VII ou plus.

CONSTRUCTIONS PARASISMIQUES

Le risque sismique peut être réduit grâce à une prévention ciblée, qui permet d’assurer une construction parasismique des nouveaux ouvrages et une réduction du risque sismique lors de modifications d’ouvrages existants à l’aide de mesures adaptées.4

La dernière génération des normes SIA a introduit de nouvelles méthodes de calcul, qui permettent de prendre en compte l’accroissement des sollicitations sismiques sans coûts supplémentaires substantiels. Le cahier technique SIA « Vérification de la sécurité parasismique des bâtiments existants » (2018) permet, entre autres, d’évaluer la sécurité parasismique des ouvrages existants. Les coûts d’un confortement parasismique ne sont pas négligeables. En moyenne, ils se situent entre 5 et 10% (avec des cas extrêmes à 20%) de la valeur du bâtiment. En principe, un confortement parasismique est réalisé dans le cadre de travaux de transformations ou de réfections.5

Depuis le 1.7.2004, toute autorisation de construire un bâtiment de plus de deux niveaux sur rez doit être accompagnée, entre autres, du « Rapport de pré-dimensionnement parasismique ».

Les propriétaires peuvent naturellement procéder à des travaux de consolidations volontaires. Dans le cadre d’un immeuble en PPE, la décision d’entreprendre des travaux pour diminuer le risque parasismique doit être prise par l’assemblée des copropriétaires. En l’absence de jurisprudence et de doctrine en la matière, on peut se poser la question à quelle majorité ces travaux doivent être décidés. Selon l’avis de droit de Me Fabien Urscheler, rédigé pour le Crealp (Centre de recherche sur l’environnement alpin)  ils doivent être considérés comme des travaux nécessaires (art. 647c CC) et adoptés par la majorité de tous les copropriétaires (présents ou représentés à l’assemblée).6  Mais, comme le précise Me Urscheler, cela dépend de chaque cas particulier. Selon nous, il faut au moins tenir compte de la situation géographique de l’immeuble (sol) et des matériaux de construction. Il faut également vérifier les dispositions du   Règlement d’administration et d’utilisation   de l’immeuble, lequel peut déroger aux dispositions du Code Civil, p.ex., en prévoyant une prise de décision par quotes-parts. De plus, s’agissant de risque assurable, il n’est pas certain que le Tribunal fédéral considérerait ces travaux comme étant « nécessaires ».

ASSURANCES

Hormis l’établissement cantonal de Zurich, lequel couvre les dommages sismiques jusqu’à concurrence de 1 milliard + 1 milliard supplémentaire si un second événement se produit dans la même année (intensité min. VII – Franchise 10% sur la VA; min, Fr. 50’000.-), il n’existe en Suisse aucune assurance incluant le risque tremblements de terre dans la police incendie-éléments naturels. Dix-sept cantons (sur 18, Berne s’étant retiré) disposant d’un établissement cantonal d’assurances sont regroupés en « pool », pour la couverture des dommages sismiques, lequel fournit des prestations volontaires jusqu’à concurrence de 2 milliards (+ 2 milliards supplémentaires en cas de second tremblement de terre survenant dans la même année). Ces prestations étant volontaires, aucune garantie n’est donnée par ces établissements.

En raison du manque de soutien de la part du Conseil fédéral, la «Communauté d’intérêts pour la prise en charge des dommages dus aux tremblements de terre» (compagnies privées) a été dissoute à la fin 2010. Jusqu’à alors, les assureurs privés mettaient à la disposition des cantons dans lesquels il n’existe pas d’assurance de droit public (établissement cantonal) un fonds facultatif de 200 millions.

En l’absence d’un consensus entre les cantons, les associations de propriétaires fonciers, l’USAM, les centres patronaux etc.., le Conseil fédéral et les chambres fédérales renoncent pour l’instant à mettre sur pied une solution obligatoire. Ces dernières ont également refusé en 2016 une initiative cantonale de Bâle-Ville pour l’introduction d’une assurance fédérale contre les séismes. Le CF estime par ailleurs que les propriétaires ont déjà, à ce jour, la possibilité de s’assurer sur une base volontaire.

ETENDUE POSSIBLE DE LA COUVERTURE

  1. Les dégâts aux bâtiments (au sens de l’assurance incendie)
  2. Les installations et le mobilier de ménage
  3. La perte de revenu locatif (seulement pour les objets loués). Pour les propriétaires habitant leur appartement ou maison, le relogement éventuel est en principe couvert par l’assurance « mobilier de ménage » sous la rubrique « Frais domestiques »
  4. Les frais d’élimination et de déblaiement
  5. Le renchérissement des coûts de construction.

PRESTATIONS

  1. Les conséquences directes du tremblement de terre (destruction, détérioration)
  2. Les dégâts causés par un incendie ou par l’eau, en conséquence directe ou indirecte d’un tremblement de terre
  3. La disparition de choses assurées lors de pillage en relation avec les points deux premiers points; il s’agit-là surtout du mobilier de ménage.

Tous les tremblements de terre qui surviennent dans les 168 heures suivant la première secousse qui a causé des dommages, constituent un même événement de sinistre. Les pertes ou dommages survenant ultérieurement sont considérés comme nouvel événement entraînant un nouveau calcul de la franchise.

ASSUREURS ET CONDITIONS

Toutes les compagnies d’assurances incluent, sur demande, le risque tremblements de terre dans leur police incendie. La société de courtage HIS Solutions et Weck, Aeby Risk Managements SA, en collaboration avec l’Helvétia, propose la couverture tremblements de terre sans lien avec la police incendie bâtiment.

Il faut savoir que

  • Les CGS de certaines compagnies prévoient encore que le risque tremblement de terre peut être résilié par les deux parties pour la fin d’une année d’assurance, en respectant un délai allant d’un à trois mois, (selon les compagnies), alors que la police incendie est conclue en principe pour une durée de 5 ans. Cette clause est résiduelle des anciennes conventions conclues entre les compagnies d’assurance branche choses et les compagnies de réassurance.
  • Selon la Loi fédérale sur le contrat d’assurance, une adaptation unilatérale du contrat est possible lorsque les circonstances déterminantes pour le calcul de la prime se modifient après la conclusion du contrat d’une façon imprévisible et où l’augmentation prévue est objectivement justifiée. (art. 48 LCA). Tel fut le cas notamment pour la couverture des dommages naturels après les fortes intempéries de 2005.  Dans ce cas, le preneur d’assurance a le droit de résilier le contrat dans sa totalité ou seulement pour la partie affectée (risque tremblement de terre par ex.) par le changement, pour la date à laquelle l’augmentation de prime doit entrer en vigueur. La résiliation est réputée valable pour autant qu’elle parvienne à l’assureur avant cette date.

En principe, les compagnies n’exigent aucune valeur minimale « d’intensité d’un séisme » (voir définition plus haut) pour la prise en charge d’un dégât. En cas de doute sur un événement d’ordre tectonique, elles se réfèrent au Service sismologique suisse. Les Etablissements cantonaux d’assurances faisant partie du pool, partent du principe que pour un séisme d’intensité inférieure à VII sur l’échelle EMS 98, les dommages éventuels peuvent être pris en charge par les propriétaires eux-mêmes.

Les conditions générales pouvant être différentes d’une compagnie à l’autre, il est utile, lorsque plusieurs offres sont demandées, de les comparer attentivement, la prime n’étant pas nécessairement le facteur le plus important.

TARIFS ET CONDITIONS

Les tarifs et les conditions varient d’une compagnie à l’autre. La plupart des compagnies prévoient un franchise de 10% sur le dommage avec des limitations maximales.  De rares compagnies offrent également une franchise calculée sur la valeur d’assurance du bâtiment. En cours de contrat, le choix de l’assureur était limité à votre assureur actuel (hormis courtier HIS), car les compagnies refusaient de couvrir uniquement le risque « tremblement de terre ». Cette pratique a néanmoins évolué depuis le début 2017, de rares compagnies acceptant de conclure des contrats d’assurance non liés à la couverture du bâtiment et pour une seule unité d’étage (PPE). De façon sommaire, on peut parler d’un taux de prime se situant entre 0.4 et 0.8‰ de la valeur d’assurance incendie du bâtiment + des prestations annexes chiffrées, telles que la perte du revenu locatif etc.  

On peut légitimement se poser la question si, dans un avenir proche, les créanciers gagistes n’exigeront pas une telle assurance lorsqu’ils accorderont un crédit garanti par un bien immobilier. La Banque cantonale de Bâle campagne, en collaboration avec la Bâloise, l’Helvetia et Swiss Re, offre à tous les clients souscrivant une hypothèque dans son établissement une couverture du risque tremblements de terre, dont la franchise par sinistre s’élève 7,5%, min. Fr. 25’000.–. Le client a la possibilité, contre rémunération, d’abaisser la franchise.

Concernant le Valais, le Grand Conseil a refusé une demande de l’Alliance de gauche, contraignant la BCVs à couvrir son portefeuille hypothécaire par une assurance obligatoire. Une telle mesure aurait pour conséquence de pénaliser la compétitivité de la BCVs.

Faut-il alors assurer son bâtiment contre le risque tremblements de terre ? Cela dépend à la fois de la qualité de la construction, de l’année de construction, de la situation de l’immeuble et des moyens financiers de chacun. Nous estimons néanmoins que, pour des bâtiments anciens, les primes d’assurance sont relativement basse par rapport au risque.

(c) Agence Imalp Gérance – 04/2020

[1] Le risque sismique – Crealp – internet

[2] Le Monde du Génie civil – internet

[3] La Suisse, à l’abri des séismes, Freya-Merret Girault, internet

[4] Office fédéral de l’Environnement – Construction parasismique

[5] id

[6] Crealp : Renforcement parasismique des immeubles existants : PPE et responsabilité – site internet

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